• Même pas en rêves

    Les tribulations d'un cloporte - Episode 07

     

     

    Sans demander mon reste, je file donc illico vers le pays des songes. Celui là même qui, chaque nuit, m'envoie vagabonder loin de mon triste quotidien.

     

    En rêve, j'me vois alors en Crésus enturbanné du genre maharadja, entouré d'un cheptel de féminines légèrement vêtues...ou pas...dociles, animales, tentaculaires et peu farouches.

    Il y en a de toutes les crinières, plus ou moins épicées mais toutes tant tellement sublimissimes qu'un choix serait pour le moins cornélien...et probablement un gâchis...!!!

    Me v'là donc en pleine orgie gargantuesque me délectant les papilles de mets exotiques et raffinés, de baisers humides et de vins enivrants...

    Tout en ripaillant j'assiste, dans un chapiteau féerique, à un spectacle ou se succèdent ensorceleuses du ventre, jongleurs émérites, cracheurs de feu, fakirs insensibles à la douleur , bouffeurs de sabres, puces savantes et autres bestioles rugissantes...

    Pour accompagner les numéros d'artistes, un orchestre de Bachibouzouks joue des rythmes endiablés*...

    Le clou de la représentation est une femme-canon, roulée façon bimbo de magazines interdits aux mineurs avec, pour tout costume, un casque intégral doré.

    En maître de cérémonie, j'approche de la donzelle sur sa rampe de lancement, et d'une torche enflammée lui assure une mise à feu dans les règles de l'art.

    La fusée au profil de déesse des Carpates décolle alors dans un vacarme pyrotechnique digne d'un 14 juillet de bord de mer, réalise quelques loopings de haute voltige et revient en rase-motte vers mézigue.

    Je saisis alors au vol la tourbillonnante et peu pudique créature avant de la catapulter de nouveau dans les airs comme un avion de papier.

    J'observe encore quelques instants la carlingue gracile du vivant projectile (avec les yeux exorbités et la langue pendante) qui réalise des prouesses chorégraphiques hors catégories, avant de la cueillir toute crue dans mes battoirs...secouée et prête à être consommée.

    Mais alors que je m'apprête à dévorer goulument l'ingénue virevoltante, un fauve majestueux à la crinière noire vient se prosterner à mes pieds et leur octroie un nettoyage express avec sa râpeuse baveuse.

    Pour le coup, j'me réveille bigrement désappointé et m'retrouve nez à museau avec Andco...mon félin miniature.

    Le greffier de malheur vient de m'extirper d'un rêve bigrement prometteur et ce con ronronne de satisfaction!

    Il se dit bien souvent qu'entre un animal de compagnie et son maître on peut observer de nombreuses similitudes...ma pomme et mon colocataire ne dérogeons pas à cette hypothèse.

    Lymphatiques, casaniers, associables, malhabiles, mal embouchés et peu gâtés par dame nature...nous sommes en bien des points semblables...!!!

    Robert...Andco...nous formons un bien lamentable duo d'inadaptés à nos catégories animales respectives...!!!

    Lorsque j'ai déniché Andco, ce dernier avait l'train arrière en déconfiture et la gueule de travers telle qu'on aurait pu la découvrir sur une toile de Picasso...

    Sans doute, dans un accès de confiance, le matou avait-il voulu se mesurer avec une gomme Michelin...et sans doute avait-il perdu...

    Il en porte aujourd'hui les stigmates et son faciès a tout de l'œuvre d'art contemporaine...du genre total'ment abstraite.

    Les pièces de son squelette s'étant ressoudées dans l'désordre, cela permet à Andco des postures étranges pour un mammifère de sa lignée.

    Ainsi, il est capable, par exemple, de s'asseoir comme un humain miniature...

     C'est d'ailleurs dans cette position qu'il passe le plus clair de son temps figé sur la murette de ma clôture...les passants en restent toujours comme deux ronds de flamby...d'autant qu'il prend un air inspiré le félidé...genre celui qu'il m'arrive d'arborer quand je m'emmerde duraille au milieu d'une assemblée de contemporains dont j'ai rien à carrer.

    Cela fait deux jours que je n'ai pas vu le cat-pattes dans les parages...et la bestiole démantibulée semble furieusement heureuse de retrouver son alter égo humanoïde...

    Après une courte séance de « caresse moi ou j'te mords » de circonstance, je décide, bien malgré moi, de renoncer définitivement à mes divagations nocturnes et revenir pour l'heure à mes terrestres préoccupations...

    Je veux attester rapidement de la présence, ou son contraire, de Bety la magnifique dans mes murs...

    Mais avant tout, il me faut retirer les quelques sournois gravillons qui se sont incrustés, lors de ma dernière chute, dans mon front déjà cabossé...cela devrait soulager un brin le mal au casque que j'me coltine...

    Je prends donc la direction de la salle de bains pour voir mon portrait dans l'miroir et ainsi faire un état des lieux approfondi de mon désespérant reflet...

     

     

    à suivre...

     

    *à écouter dans la rubrique bande son


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  • Commentaires

    1
    Kaël Parys
    Samedi 4 Décembre 2010 à 12:10

    Excellent cet épisode. Le passage sur le chat m'a bien fait marrer.

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